Développement tumoral et pressions mécaniques : des relations élucidées


Le cancer colorectal - qui réunit les tumeurs du côlon et du rectum - est le cancer digestif le plus fréquent en France. Il touche principalement les plus de 50 ans. Il se soigne de mieux en mieux, notamment lorsqu’il est détecté tôt. C’est pourquoi des campagnes de dépistage sont organisées en France. Des prédispositions génétiques ont été identifiées, mais c’est principalement le mode de vie qui augmente le risque de développer la maladie. Le tabagisme, la consommation d’alcool, une alimentation déséquilibrée (notamment l’excès de viande rouge et de charcuterie), la sédentarité, l’inactivité physique, le surpoids et l’obésité favorisent l’émergence du cancer colorectal. Depuis quelques années, l’incidence de ce cancer augmente chez les jeunes.
La recherche se mobilise pour mieux comprendre cette évolution.
Le cancer colorectal est très fréquent en France.
Selon l'Institut national du cancer (Inca), 47 582 nouveaux cas de cancer colorectal ont été recensés en France, en 2023. Il se situe au troisième rang des cancers les plus fréquents chez les hommes (55 %) et en seconde position chez les femmes (45 %), après le cancer de la prostate et celui du sein. Depuis 2010, l’incidence de cette maladie est toutefois relativement stable : elle régresse de 0,5 % par an chez les hommes, mais augmente légèrement chez les femmes (+0,4 %).
Le cancer colorectal est l’un des cancers les plus meurtriers : il était responsable de 17 117 décès en 2021, au deuxième rang des décès par cancer chez les hommes et au troisième chez les femmes. Depuis les années 1990, les traitements se sont améliorés, si bien que le taux de survie à 5 ans a grimpé de 12 points depuis lors, pour atteindre 63 % en 2015 (derniers chiffres à date).
Les jeunes sont désormais aussi concernés. Entre 2000 et 2020, le risque de cancer colorectal a grimpé de 1,43 % par an, chez les adolescents et les jeunes adultes âgés de 15 à 39 ans. En 1990, on détectait 0,3 nouveau cas pour 100 000 habitants. Ce chiffre atteignait 1,26/100 000, en 2018, soit quatre fois plus. Cette tendance s’observe dans de nombreux pays à travers le monde.
Le cancer colorectal réunit les tumeurs du côlon (gros intestin) et du rectum. Il se développe généralement à partir de cellules tumorales bénignes, appelées polypes adénomateux ou adénomes, qui apparaissent au niveau de la muqueuse colorectale, évoluent lentement et finissent par devenir malignes. Cette évolution touche 2 à 3 % des adénomes, et peut prendre plusieurs années.
Aux premiers stades de la maladie (stades 0, I et II), les cellules cancéreuses restent localisées au niveau du côlon et du rectum. Mais en évoluant, elles peuvent toucher les organes voisins (stade III) puis, notamment lorsque les ganglions lymphatiques et le système sanguin sont atteints, migrer vers d’autres organes pour former des métastases (stade IV).
Le cancer colorectal est une maladie multifactorielle.
Il existe des prédispositions génétiques : la polypose adénomateuse familiale (maladie héréditaire caractérisée par l’apparition de nombreux polypes au niveau du côlon) et le syndrome de Lynch (prédisposition génétique à développer certains cancers) augmentent le risque de cancer colorectal. Il se déclare alors généralement avant l’âge de 40 ans.
En outre, l’Inca estime que 10 à 15 % des cancers colorectaux se développent chez des personnes ayant des antécédents familiaux de cancer colorectal.
Des pathologies comme la maladie de Crohn ou la rectocolite hémorragique induisent aussi une augmentation du risque de développer ce cancer.
Le mode de vie influence aussi fortement le risque de cancer colorectal. Ces « facteurs de risque environnementaux » sont aujourd’hui bien connus : une alimentation déséquilibrée (excès de viande rouge et charcuterie ou manque de fibres et de calcium), la sédentarité, l’inactivité physique, le surpoids, l’obésité, l’alcool et le tabac augmentent significativement le risque de cancer colorectal.
À ce titre, ils représentent un moyen de prévention facilement accessible : il a été estimé qu’en changeant de mode de vie, près de 70 % des cancers colorectaux pourraient être évités dans les pays occidentaux.
La pratique d’une activité physique quotidienne, une alimentation riche en fibres et la consommation de produits laitiers sont des facteurs protecteurs dans ces cancers.
Détecté tôt, le cancer colorectal se guérit bien : 90 % des patients dépistés à un stade très localisé de la maladie sont encore en vie 5 ans plus tard. Ils ne sont plus que 12 % au stade IV. Afin d’améliorer les chances de guérison des patients, des campagnes de dépistage ont été mises en place.
En France, le dépistage est proposé gratuitement entre 50 et 74 ans et repose sur une technique simple : la détection de traces de sang « occultes » (invisibles à l'œil nu) dans les selles.
En cas de positivité, une coloscopie est indiquée : il s'agit d'un examen du côlon par les voies naturelles, sous anesthésie, à l’aide d'une sonde munie d'une caméra. Une biopsie et une analyse en laboratoire des lésions détectées dans le côlon confirmera le diagnostic.
Les autorités de santé conseillent de pratiquer ce test tous les 2 ans entre 50 et 74 ans chez les personnes qui n'ont pas d’antécédents et aucun facteur de risque particulier. Pour les personnes à risque ou présentant des symptômes de la maladie, une coloscopie peut être proposée plus précocement.
Les symptômes du cancer colorectal sont discrets et ne se révèlent que dans les phases plus avancées de la maladie. Il s’agit principalement de douleurs abdominales, de modifications du transit, voire de saignements dans les selles (les rendant plus foncées). Avec l’évolution de la maladie, le patient pourra sentir une masse palpable au niveau de l’abdomen et son état général peut se dégrader, avec une perte de poids, une fatigue inexpliquée, une anémie, voire de la fièvre.
Les symptômes peuvent inclure :
En cas de suspicion d’un cancer du côlon ou du rectum, à la suite d’un dépistage ou à des symptômes évocateurs, le diagnostic doit être confirmé. Le gastro-entérologue pourra effectuer un toucher rectal ou une rectoscopie lors de la consultation, afin d’analyser la paroi du rectum. Le plus souvent, il prévoit la réalisation d’une coloscopie, sous une brève anesthésie générale. Cet examen permettra de visualiser d’éventuelles lésions sur la paroi du côlon et/ou du rectum. Des prélèvements (biopsies) seront effectués et analysés afin de vérifier la présence (ou non) de cellules cancéreuses.
Une classification internationale permet de définir le stade du cancer. Elle repose sur trois critères : taille et profondeur de la tumeur ; atteinte ou non des ganglions lymphatiques et nombre de ganglions atteints ; présence ou non de métastases.
Les 5 stades de la maladie sont :
En fonction du stade de la maladie, des examens complémentaires pourront être prescrits pour vérifier l’étendue des lésions :
Le traitement de première intention repose sur l'intervention chirurgicale, destinée à enlever la portion de côlon ou de rectum atteinte. Elle est éventuellement associée à une chimiothérapie ou à une radiothérapie selon le stade du cancer et ses caractéristiques. Ces traitements sont parfois entrepris en amont de l'acte chirurgical en vue de réduire la taille de la tumeur avant son extraction.
Des thérapies dites « ciblées », autrement appelées « anticorps monoclonaux », ont vu le jour dans la prise en charge de la pathologie. Elles sont souvent utilisées dans le cas de cancers colorectaux avancés (dits métastatiques, c'est-à-dire s'étant étendus à d'autres localisations que le côlon ou le rectum). Les thérapies ciblées s'attaquent aux vaisseaux sanguins qui alimentent les tumeurs en vue de les affaiblir ou se fixent directement sur les cellules tumorales pour les détruire.
Les recherches actuelles soulèvent de nombreux espoirs. Toutes les étapes font l'objet de recherches : génétique, dépistage et diagnostic, traitement, prévision de l'évolution clinique et de la réponse aux traitements.
Ainsi, les équipes étudient actuellement des gènes et des protéines qui pourraient apporter un bénéfice dans le dépistage et le diagnostic précoce des cancers colorectaux : un préalable essentiel pour améliorer la prise en charge des patients.
La recherche s’attelle également à mieux comprendre l’apparition et le développement de la maladie. Par exemple, des chercheurs ont découvert que la pression mécanique qu’exercent les cellules cancéreuses sur les organes alentour pouvaient favoriser la progression de la maladie. Cette découverte apporte de nouvelles pistes thérapeutiques basées sur le blocage de ce processus mécano-sensible, pour limiter la progression de la maladie.
D’autres scientifiques se sont intéressés aux mécanismes moléculaires au cœur de la formation et de la migration des métastases au cours du cancer du côlon : leurs travaux pourraient déboucher sur de nouvelles pistes pour mieux lutter contre leur développement.
Des chercheurs étudient la diversité des cellules présentes au sein de la tumeur, afin de déterminer avec précision quels sont les traitements les plus efficaces pour les combattre. Ces études pourraient permettre de mieux comprendre le développement des différents types de cellules tumorales.
La mise au point de nouvelles thérapies dites « ciblées » fait aussi l'objet de l'intérêt des chercheurs : il s'agit de cibler des caractéristiques très précises des cellules tumorales en vue de les détruire préférentiellement.
L'immunothérapie est aussi une voie de traitement à l'étude qui pourrait être appliquée à certains cancers colorectaux. Cette stratégie repose sur l'utilisation de traitements qui modulent l'activité du système immunitaire afin qu'il puisse combattre les cellules cancéreuses. Des travaux récents ont montré que l'immunothérapie améliore fortement la réponse à la chimiothérapie, dans les formes génétiques du cancer du côlon liées à un phénomène nommé « instabilité des microsatellites ».
Des travaux récents suggèrent que le microbiote intestinal aurait un impact sur la pathologie. Plusieurs études s'accordent en effet à dire que des bactéries naturellement présentes au niveau du côlon pourraient favoriser le développement du cancer. Les équipes explorent ainsi l'impact que pourrait avoir une modulation de l'activité de certaines bactéries du côlon sur la progression du cancer et sur son issue.
L’augmentation des cancers colorectaux chez les jeunes soulève de nombreuses questions pour la communauté scientifique. Des études tentent par exemple de comprendre si l’exposition à certains produits, tels les aliments ultra-transformés, les pesticides, les microplastiques, les perturbateurs endocriniens, les antibiotiques à répétition, voire la pollution atmosphérique pourraient augmenter le risque de développer un cancer colorectal.
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