Poissons et régénération : réparer les lésions cardiaques


L’insuffisance cardiaque touche plus de 1,5 millions de personnes en France et sa fréquence augmente avec le vieillissement de la population. Cette maladie chronique affecte la capacité du cœur à pomper efficacement le sang. Comprendre ses causes, ses symptômes, son diagnostic, les traitements actuels et les recherches en cours est essentiel pour mieux prévenir la pathologie et accompagner les patients.
La prévalence de l’insuffisance cardiaque est très élevée. Selon Ameli, elle concernerait 1,5 millions de personnes en France, et en particulier les plus de 60 ans. Il s’agit d’une affection en forte croissance, liée au vieillissement de la population, mais aussi à l’augmentation des facteurs de risque comme l’hypertension artérielle, le diabète et l’obésité.
D’après Santé publique France, l’insuffisance cardiaque serait à l’origine de plus de 180 000 hospitalisations en 2022. En outre, la maladie serait la cause initiale ou associée de plus de 70 000 décès par an dans l’hexagone. Ces chiffres montrent l’ampleur du phénomène.
De surcroît, le vieillissement de la population et l’explosion des facteurs de risque cardiovasculaires font de l’insuffisance cardiaque un sujet majeur pour l’avenir : Ameli estime que la fréquence de la pathologie va augmenter de 25 % tous les 4 ans.
L’insuffisance cardiaque signifie que le cœur n’assure plus son rôle de pompe. Il ne permet plus d’envoyer le sang dans l’ensemble de l’organisme, privant les cellules d’oxygène et des nutriments indispensables à leur bon fonctionnement.
La maladie est liée à une perte de contractilité du myocarde, le muscle cardiaque. Quand cela concerne le « cœur gauche », on parle d’insuffisance ventriculaire gauche, et le « cœur droit », d'insuffisance ventriculaire droite. On distingue également une forme aiguë, souvent brutale et liée à un événement cardiovasculaire soudain, et une forme chronique irréversible, qui évolue lentement et s’aggrave progressivement avec les années.
Tout d’abord, le rythme du cœur s’accélère pour pallier la perte de contractilité. Ensuite, sa paroi s’épaissit et ses cavités se dilatent : c’est l'hypertrophie cardiaque. Cette dernière induit une fatigue du cœur menant à l'insuffisance cardiaque. Ces mécanismes dits « compensatoires » deviennent avec le temps contre-productifs et contribuent à aggraver la maladie. D’autres organes, tels que les reins, le foie ou les poumons, peuvent être impactés.
L’insuffisance cardiaque peut résulter d’un défaut de contraction du muscle cardiaque (dysfonction systolique), d’un remplissage inadéquat des cavités cardiaques (dysfonction diastolique), ou des deux à la fois. De nombreuses maladies cardiovasculaires peuvent être à l’origine de ces désordres.
L’une des causes les plus fréquentes de l’insuffisance cardiaque est l’infarctus du myocarde. Il survient lorsque l’obstruction d’une artère coronaire prive une partie du muscle cardiaque d’oxygène. Cette mort du tissu cardiaque diminue la capacité du cœur à se contracter, ce qui peut entraîner à moyen terme une insuffisance cardiaque.
L’hypertension artérielle chronique représente un risque majeur d’insuffisance cardiaque. Lorsque la pression du sang contre les parois des artères reste élevée dans le temps, le cœur doit fournir davantage d’efforts pour maintenir une circulation correcte. Ce travail excessif provoque un épaississement des parois cardiaques puis une perte de souplesse et d’efficacité du myocarde, conduisant petit à petit à une insuffisance cardiaque.
Les cardiomyopathies désignent un ensemble de maladies affectant directement le muscle cardiaque. Certaines formes sont génétiques, comme la cardiomyopathie hypertrophique familiale, tandis que d’autres peuvent avoir une origine infectieuse, toxique ou médicamenteuse. Ces atteintes altèrent la structure et le fonctionnement du cœur, favorisant l’installation d’une insuffisance cardiaque.
Les valvulopathies, qui touchent les valves du cœur, c’est-à-dire les membranes responsables de l’étanchéité et du passage du sang entre ses différentes cavités, peuvent aussi être responsables d’une insuffisance cardiaque. En perturbant le flux sanguin entre les cavités cardiaques, elles entraînent une surcharge de travail pour le myocarde. À long terme, cette surcharge peut induire une fatigue du cœur favorisant l’insuffisance cardiaque.
Les arythmies cardiaques, qu’il s’agisse de battements trop rapides (tachycardies) ou trop lents (bradycardies), peuvent altérer la contraction du cœur. Une fréquence cardiaque irrégulière ou mal synchronisée compromet l’éjection du sang, ce qui, à terme, peut conduire à une défaillance cardiaque.
D’autres facteurs peuvent contribuer au développement ou à l’aggravation de l’insuffisance cardiaque. La consommation excessive d’alcool, la prise de drogues cardiotoxiques, les pathologies pulmonaires chroniques comme la BPCO, l’anémie sévère et l’hyperthyroïdie, sont autant de situations qui sollicitent anormalement le cœur et peuvent entraîner son épuisement progressif.
Parmi les symptômes de l’insuffisance cardiaque, quatre sont plus spécifiques à la maladie. Ils sont regroupés sous l’acronyme « EPOF », désignant un essoufflement à l’effort lié à une stagnation du sang au niveau des poumons (E), une prise de poids importante en peu de temps (P), un gonflement des mains et pieds avec œdèmes (O), et une fatigue physique (F).
À ces signes typiques peuvent s’ajouter d’autres symptômes, moins spécifiques, mais fréquents : des douleurs thoraciques, abdominales ou au foie, des palpitations, des nausées et une perte d’appétit, une perturbation du sommeil, ainsi qu’un dysfonctionnement voire une insuffisance rénale. Chez les personnes âgées, la pathologie peut se révéler par des troubles cognitifs tels qu’une perte de mémoire, une confusion, ou des difficultés de concentration, compliquant le diagnostic.
L’insuffisance cardiaque ne se limite pas au cœur : c’est une maladie systémique, qui peut impacter l’ensemble des organes. Les reins en particulier sont souvent affectés, entraînant parfois une insuffisance rénale secondaire. La congestion veineuse peut également toucher le foie, tandis que la mauvaise perfusion générale peut altérer les fonctions cérébrales, digestives ou musculaires. Pour résumer, tous les organes peuvent être touchés !
Le diagnostic de l’insuffisance cardiaque repose d’abord sur un examen clinique minutieux, au cours duquel le médecin recherche les symptômes évocateurs : essoufflement, prise de poids rapide, œdèmes et fatigue inhabituelle. Un bilan sanguin est systématiquement réalisé, notamment pour doser le peptide BNP ou NT-proBNP, des marqueurs biologiques dont l’élévation peut témoigner d’une souffrance cardiaque.
Les examens d’imagerie cardiaque sont incontournables pour repérer d’éventuelles anomalies au niveau du cœur. La radiographie thoracique apporte des informations globales, orientant le diagnostic. L’échographie Doppler permet quant à elle d’observer le cœur en fonctionnement et d’identifier de potentiels dysfonctionnements. L’électrocardiogramme permet enfin de mettre en évidence des éventuels troubles du rythme cardiaque.
D’autres techniques peuvent être utilisées, telles que l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) ou le scanner cardiaque, afin d’observer plus en détail la morphologie du cœur. Des **épreuves d’effort ** ou des tests de capacité fonctionnelle, comme la mesure de la « VO2max », peuvent également être requis pour estimer la sévérité de l’insuffisance cardiaque.
En parallèle de la prise en charge de la pathologie impliquée dans la survenue de l’insuffisance cardiaque, il est indispensable d’améliorer l’hygiène de vie des patients. Un régime hyposodé, pauvre en sel, permet notamment de limiter la rétention d’eau, donc l’essoufflement et les œdèmes. Une activité physique régulière et adaptée est encouragée, tout comme la perte de poids en cas de surcharge pondérale.
Il est surcroît nécessaire de cesser le tabac, de réduire la consommation en alcool et les apports en graisses saturées. La correction des carences en fer est aussi conseillée afin de ne pas aggraver la fatigue et les difficultés à l’effort.
Des médicaments sont généralement prescrits par le médecin pour minimiser la progression de la maladie. La base du traitement pharmacologique repose sur l’association de plusieurs classes de molécules. Les diurétiques sont utilisés pour limiter les symptômes congestifs en diminuant le volume sanguin circulant. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) ou les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA2) contribuent à baisser la pression artérielle et à protéger le muscle cardiaque. Quant aux bêtabloquants, ils ralentissent la fréquence cardiaque et permettent au cœur de travailler plus efficacement.
Les médecins recommandent par ailleurs d'être à jour sur les vaccins. En effet, diverses infections, comme la grippe ou les pneumonies, et plus récemment la Covid-19, sont plus graves chez les insuffisants cardiaques.
Selon l’origine de l’insuffisance cardiaque, une intervention chirurgicale peut aussi être envisagée, par exemple pour remplacer les valves du cœur, réaliser un pontage coronaire ou poser un défibrillateur en cas d’arythmie. Au stade ultime de la maladie, lorsque toutes les thérapies ont été essayées, le seul recours possible reste la greffe cardiaque.
Les thérapies de rééducation cardiaque comprennent un entraînement physique personnalisé, combiné à une éducation thérapeutique et un soutien psychologique. Ces méthodes ont déjà montré leur efficacité pour freiner la maladie. Il est donc important de ne pas les négliger.
La recherche se bat sur tous les fronts pour limiter l’insuffisance cardiaque et mieux prendre en charge la pathologie.
Un des premiers enjeux de la recherche sur l’insuffisance cardiaque est d’améliorer le diagnostic et le suivi de la pathologie. L’identification de nouvelles molécules-marqueurs dans le sang permettrait par exemple d’aider le diagnostic, mais aussi de déterminer l’avancée de la maladie et les risques associés. On peut également citer les innovations développées autour de la télésurveillance, comme les dispositifs, invasifs ou non, offrant la possibilité de détecter les aggravations de la pathologie chez les patients, et donc d’agir plus rapidement.
Du point de vue de la physiopathologie, les scientifiques tentent de mettre en évidence des protéines et mécanismes moléculaires impliqués dans les modifications que subit le cœur au cours de la maladie, avec pour objectif de découvrir de nouvelles voies de traitement. Ainsi, une équipe a récemment mis au point une molécule prometteuse qui améliore les capacités de pompage du cœur et aurait une action sur l’apnée du sommeil. En outre, des études cliniques ont prouvé l’efficacité de plusieurs classes de médicaments contre l’insuffisance cardiaque. Les essais se poursuivent, mais des traitements innovants pourraient bientôt devenir disponibles.
Des recherches s’intéressent à la réparation du muscle cardiaque après un infarctus du myocarde. Une des pistes suivies repose sur l’utilisation de vésicules extracellulaires, des petits sacs synthétisés par les cellules qui contiennent des molécules véhiculant des informations vers d’autres cellules. Elles pourraient favoriser la formation de cellules cardiaques contractiles pour remplacer les cellules perdues lors de l’infarctus. Une autre manière de réparer le cœur repose sur l’injection dans les zones lésées d’un biomatériau contenant des cellules souches cardiaques. Ces différentes solutions se positionnent comme des alternatives à la greffe. En effet, le nombre de donneurs reste bien en dessous des besoins des receveurs : l’attente peut durer des mois, voire des années. De plus, la réussite des greffes n’est pas garantie et les effets secondaires restent très lourds à gérer pour les patients.
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