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HOLIMITOX : les fongicides SDHI présentent un profil toxicologique préoccupant, d’après les scientifiques toxicologues

03 juin 2025

Appliqués sur de nombreuses cultures en Europe, les fongicides SDHI ciblent la mitochondrie, un organite essentiel à la vie. Les perturbations physiologiques observées chez le champignon, l’abeille, le poisson, la souris et les cellules humaines sont inquiétantes. Les chercheurs du réseau Holimitox ont fait le point et plaidé pour une évaluation réglementaire plus stricte, à l’occasion d’une journée de restitution fin 2024.

Pulvérisateur de pesticides sur des cultures dans un champ.

Depuis 2020, le réseau Holimitox fédère seize laboratoires de recherche de différentes disciplines. Son objectif : proposer une évaluation approfondie et interdisciplinaire de l’usage des fongicides SDHI (pour Succinate dehydrogenase inhibitors, en anglais), caractériser leur toxicité sur le vivant, initier une surveillance épidémiologique, identifier leurs alternatives potentielles.

Destinés à lutter contre les moisissures, les acariens et les nématodes, ces pesticides ciblent la mitochondrie, principal siège de la production d’énergie au niveau cellulaire. Essentiel à la vie, la mitochondrie est présente dans quasiment tout le règne vivant (champignons, végétaux et animaux) et la structure de l’enzyme mitochondriale ciblée (la SDH) reste très similaire d’une espèce à l’autre. Les chercheurs suspectent fortement un effet sur la santé humaine. Ils soulignent d’ailleurs que certaines maladies génétiques touchant spécifiquement la SDH se traduisent par des atteintes du système nerveux, des cancers neuro-endocriniens ou des maladies rénales.

Des pesticides largement employés, des alternatives imparfaites

Parmi les 27 substances actives connues de ce groupe de fongicides à large spectre, onze sont actuellement approuvées au sein de l’Union européenne. En France, on les retrouve dans nombre de formulations commerciales pour traiter les grandes cultures, les vignobles, les fruits et légumes ou les plantes ornementales. Sur les 500 à 700 tonnes de produits vendus dans l’Hexagone chaque année, les trois quarts sont employés pour traiter les céréales de type blé, orge, etc. Depuis 2008, les usages se diversifient, avec une progression des surfaces traitées, notamment par enrobage préventif de semences.

Six SDHI - bixafen, boscalid, fluopyram, mépronil et thifluzamide - se retrouvent d’ailleurs dans les eaux de surface à travers le monde, bien souvent à des concentrations très supérieures à la limite européenne imposée pour l’eau potable. Trois SDHI contaminent l’air, à des niveaux dont on ne connaît pas les effets.

Plusieurs leviers d’actions pour diminuer l’usage des SDHI, et donc leur dissémination, ont été identifiés : l’agriculture de précision, les solutions de biocontrôle (actuellement peu utilisées), la conception de pratiques préventives ou encore le passage à l’agriculture biologique. Quelle que soit la technique alternative employée, celles-ci impliquent un risque en termes de rendement. Un accompagnement socio-économique et une révision de nos consommations agro-alimentaires seraient donc nécessaires.

Perturbations observées chez les champignons et les animaux

Champignons, abeilles, poissons, souris… : la recherche a permis de révéler de larges effets de ces pesticides sur le vivant. Ainsi, les champignons exposés aux SDHI réduisent leur production de mycotoxines, comme escompté, mais l’expression de 1 200 gènes est également modifiée sans que les conséquences ne soient encore établies. Chez l’abeille, le SDHI dans sa formulation commerciale tue à moyen terme. Etonnamment, les abeilles co-infectées par un champignon parasite semblent en tirer un bénéfice immédiat. Mais une analyse plus fine révèle que la physiologie de l’abeille est alors modifiée et finalement, l’exposition simultanée au parasite et au produit accentue l’effet délétère de l’infection. Un constat inquiétant sachant que pollen et nectar sont contaminés par les SDHI.

Chez la souris, même constat. Après 6 mois d’exposition via l’alimentation à des doses que la réglementation considère comme sans effet, la physiologie de tous les organes testés (foie, cerveau, rein, surrénales) sont modifiés. De plus, jusqu’à 25 % des métabolites du plasma présentent des concentrations altérées. Sentinelle des milieux aquatiques, le carassin, un poisson modèle en écotoxicologie, s’est révélé sensible aux SDHI. Selon la formulation employée, la durée et la dose, le fonctionnement mitochondrial a été modifié et des perturbations comportementales ont été observées. En outre, une toxicité hépatique était observée ici aussi, dès 4 jours d’exposition.

Une toxicité chez l’humain, négligée par l’évaluation réglementaire

Alors, qu’en est-il de l’humain ? Les études menées sur les cellules humaines ne sont pas plus rassurantes et montrent un effet des SDHI sur l’activité mitochondriale. Si elles n’enregistrent aucun effet sur la viabilité des cellules de rein, du côlon ou du foie (bien que des modifications de fonctionnement soient observées), les cellules neurales meurent en plus grand nombre et se divisent moins sous l’effet des fongicides SDHI. Ces pesticides agissent plus largement que sur leur cible mitochondriale, modifiant, par exemple, le fonctionnement de transporteurs membranaires, pouvant nuire à l’efficacité de médicaments.

Malgré l’ensemble de ces données expérimentales attestant de la toxicité mitochondriale (mitotoxicité) chez l’animal et chez l’humain, les agences réglementaires ne semblent pas juger que ce soit un mécanisme à considérer dans l’évaluation des produits chimiques mis sur le marché. Cette invisibilité de la mitotoxicité serait un choix largement influencé par l’industrie agrochimique puisque, selon l’organisation actuelle de l’évaluation réglementaire, les industriels fournissent les données, suggèrent quels critères sont à étudier et quelles doses sont pertinentes. De plus, l’industrie entretient un argumentaire «  de non-pertinence humaine  » des effets délétères observés chez le rongeur. Ainsi, si beaucoup de SDHI sont capables d’induire des tumeurs chez les rongeurs (tumeurs de la thyroïde, du foie, des surrénales et des testicules…), seuls peu de SDHI sont classés comme « cancérigènes suspectés chez l’humain » par l’Europe.

Les scientifiques interpellent les décisionnaires afin de croiser les expertises académiques et réglementaires pour mener une évaluation plus rigoureuse et indépendante des risques générés par les usages agronomiques des fongicides SDHI.

Soutien FRM

  • 599 664€

    attribués au projet sur les SDHI porté par Laurence Huc, coordinatrice du réseau Holimitox, dans le cadre de l’appel à projets Environnement et Santé 2020

TribuneImpact des polluants chimiques sur la santé : la science alerte, la réglementation doit suivre !

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