Article réalisé avec la collaboration du Pr Patrick Couvreur, membre de l’Académie des sciences, spécialiste de la nanomédecine à l’université Paris-Sud.
« Un nanomédicament est une molécule thérapeutique contenue dans une particule mesurant entre quelques dizaines et quelques centaines de nanomètres [soit un million de fois moins qu’un millimètre] », explique Patrick Couvreur, spécialiste de la nanomédecine.
Cette nanoparticule protège le principe actif du médicament d’une éventuelle dégradation. « On peut aussi désormais modifier la surface de la nanoparticule pour lui permettre de se lier uniquement à certaines cellules malades, un peu comme une clé dans une serrure », décrit Patrick Couvreur.
Avantage par rapport à un médicament classique : une action plus ciblée et, a priori, moins d’effets secondaires.
Une dizaine de nanomédicaments sont déjà sur le marché, la plupart en cancérologie. La doxorubicine enfermée dans des liposomes est une chimiothérapie utilisée contre certains cancers du sang ou de l’ovaire. Le paclitaxel contenu dans des nanoparticules d’albumine est, quant à lui, utilisé dans les cancers du sein, du poumon et du pancréas. « Un essai clinique de phase 3 [derniers tests avant la commercialisation du traitement] est en cours avec des nanoparticules biodégradables développées par mon équipe, explique Patrick Couvreur. Ces nanoparticules encapsulent de la doxorubicine pour traiter un cancer primitif du foie. Les résultats de la phase 2 [qui évalue l’efficacité du traitement] avaient déjà montré une chance de survie multipliée par deux pour les malades, 18 mois après traitement, par rapport au traitement standard. » D’autres chercheurs mettent au point des nanoparticules magnétiques, capables de s’associer à certaines cellules cancéreuses. Une fois ces nanoparticules fixées dans la tumeur, elles sont stimulées par un champ magnétique externe. Ce phénomène permet d’augmenter la température sur la zone concernée et ainsi de détruire les cellules cancéreuses.
Les scientifiques cherchent aujourd’hui à améliorer l’efficacité des nanomédicaments. « Les techniques actuelles ont un taux d’encapsulation [taux de molécules enfermées dans la nanoparticule] assez faible : il faut beaucoup de nanoparticules pour finalement n’y encapsuler qu’assez peu de molécules actives (ou médicament) », explique Patrick Couvreur, dont l’équipe travaille sur de nouvelles méthodes capables de mieux associer le médicament et la nanoparticule. « Nous cherchons à identifier les liaisons chimiques entre le médicament et la nanoparticule pour mieux les rompre. Le but est de pouvoir libérer le médicament dans des conditions spécifiques, afin de cibler plus précisément l’action thérapeutique. » Certains travaux cherchent à développer des nanomédicaments contre d’autres maladies que les cancers : des infections ou des maladies cardiovasculaires par exemple.
Article extrait du magazine " Recherche & Santé 143 "