Syndrome du X fragile et trouble du spectre de l’autisme : mieux comprendre les origines de ces maladies


Le trouble du spectre de l’autisme, touche environ 700 000 personnes en France. Ce trouble neurodéveloppemental, aux manifestations très diverses, affecte les interactions sociales, la communication et les comportements. Une prise en charge précoce et individualisée permet d’améliorer considérablement le quotidien des malades.
Selon l’Inserm, environ 700 000 personnes sont atteintes d’un trouble du spectre de l’autisme (TSA) en France, dont 100 000 jeunes âgés de moins de 20 ans. Le TSA est trois à quatre fois plus fréquent chez les garçons que chez les filles. Les premières manifestations de la maladie apparaissent le plus souvent entre 18 mois et 3 ans.
Autrefois, on évoquait l’autisme au singulier. Aujourd’hui, on parle de trouble du spectre de l’autisme, tant les formes cliniques de la maladie sont variées. Cette extension de la définition, adossée à un meilleur repérage des enfants concernés, explique en grande partie l’augmentation de la prévalence du TSA : de 1 cas pour 5 000 en population générale en 1975, nous sommes passés à 1 cas pour 100 d’après les estimations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Toutefois, cette prévalence varie en fonction des critères diagnostiques et des méthodes de dépistage en place dans les différents pays.
Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un ensemble hétérogène de troubles de mise en place du système nerveux au cours du développement embryonnaire et de la croissance d’un individu. On parle de « trouble du neurodéveloppement », car la maladie apparaît très précocement et affecte durablement le fonctionnement cognitif, émotionnel et social du patient.
Une très grande diversité de TSA, allant d’autismes sévères à des profils sans déficience intellectuelle, rend compte de la complexité de la pathologie, des parcours de soin et d’accompagnement proposés aux malades. Cette multiplicité génère de nombreuses incompréhensions et idées reçues qu’il convient d’éclaircir.
Le trouble du spectre de l’autisme est une pathologie multifactorielle, comportant une part de facteurs génétiques et une part de facteurs environnementaux, intervenant principalement durant la grossesse et les premières années de vie. Les données actuelles soutiennent l’idée d’une interaction entre un terrain génétique prédisposant et des facteurs environnementaux précoces qui, ensemble, modifient le développement du cerveau et peuvent conduire à un TSA.
Les facteurs génétiques sont les principaux facteurs de risque du trouble du spectre de l’autisme : la part d’héritabilité se situerait autour de 80 % d’après les données de la Haute autorité de santé (HAS). Pour autant, il ne suffit pas d’une altération génétique pour que la pathologie survienne. Avec l’amélioration des techniques d’analyse génétique, on connaît désormais près de 200 gènes impliqués dans le TSA. Beaucoup d’entre eux interviennent dans le développement du système nerveux et le fonctionnement des synapses, les zones de communication entre les neurones.
En ce qui concerne les facteurs de risque extérieurs, l’environnement précoce au cours de la grossesse et de la petite enfance joue un rôle important. Plusieurs éléments toxiques ont été identifiés, comme les perturbateurs endocriniens et la pollution intérieure. Une grande prématurité, l’obésité de la mère, le stress des parents avant et après la naissance, ou un déficit en folates et vitamine D pendant la grossesse augmentent aussi le risque de trouble du spectre de l’autisme.
Les manifestations du TSA sont très variables dans le temps et selon les patients. On peut néanmoins tirer quelques généralités.
Le trouble du spectre de l’autisme est caractérisé par deux types de symptômes qui affectent les relations sociales et la communication d’une part, les comportements et les intérêts d’autre part. Il s’agit concrètement de difficultés à établir un contact visuel ou physique, à exprimer des émotions ou à percevoir celles des autres, et à communiquer, verbalement ou non.
Les personnes atteintes de TSA présentent ainsi des altérations du comportement comme des activités répétitives, et un répertoire d’intérêts limité. S’y ajoutent des troubles sensoriels, avec une hypo ou une hypersensibilité conduisant à des réactions inhabituelles. L’ensemble de ces symptômes entraînent des difficultés d’apprentissage et d’insertion sociale.
Seuls 40 % des patients avec un trouble du spectre de l’autisme présentent une déficience intellectuelle. Le syndrome d’Asperger, qui n’existe plus en tant que tel dans les classifications médicales, est par exemple associé à un bon développement intellectuel. À l’inverse, certaines formes de TSA se manifestent dans le cadre de maladies génétiques rares avec un handicap intellectuel important, comme le retard mental lié à l’X ou le syndrome de l’X fragile.
Il peut en particulier y avoir des troubles déficitaires de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), des problèmes de coordination des mouvements ou de développement spécifique du langage et, dans 40 % des cas, une épilepsie associée, plus ou moins sévère.
Les comorbidités, c’est-à-dire les maladies interférant avec le trouble du spectre de l’autisme, sont très fréquentes. Il peut s’agir de problèmes de sommeil, de troubles digestifs liés ou non au comportement alimentaire, ou encore de troubles anxieux et de troubles dépressifs.
Le diagnostic du TSA est exclusivement clinique : les médecins observent les enfants et interrogent leurs parents pour identifier les différentes manifestations de la maladie et leur évolution. Ils évaluent le langage, la coordination, la socialisation, la cognition, et les comparent à ce que l’on connaît du développement neurologique « normal » d’un enfant.
Aucun test biologique ou examen d’imagerie cérébrale ne permet aujourd’hui d’établir le diagnostic d’un trouble du spectre de l’autisme. C’est l’observation fine, sur la durée, des comportements et des interactions qui constituent le socle de l’évaluation. Le diagnostic repose généralement sur des outils standardisés comme les échelles ADOS-2 et ADI-R. Ces instruments permettent une analyse approfondie des interactions sociales, de la communication, des intérêts restreints et des comportements répétitifs.
Un repérage de la maladie dès 18 mois est crucial pour permettre une prise en charge adaptée. Les signes d’alerte comprenant un manque de réponse au prénom, l’absence de pointage ou de jeu symbolique, ou encore des troubles du sommeil et de l’alimentation.
Une équipe pluridisciplinaire est mobilisée pour poser un diagnostic complet, incluant pédopsychiatre, neuropédiatre, orthophoniste, psychologue et psychomotricien. En France, selon l’Assurance maladie, une évaluation médico-psychologique gratuite peut être demandée auprès d’un Centre d’action médico-sociale précoce (CAMSP) ou d’un Centre ressource autisme (CRA).
Pour le moment, il n’existe aucun médicament contre le TSA, mais des traitements sont utiles pour contrecarrer les troubles associés, tels que l’épilepsie. La prise en charge repose sur trois types d’actions mises en œuvre dans le cadre d’un plan d’interventions personnalisé, qui permet d’améliorer significativement la qualité de vie et le développement des patients.
Tout d’abord, des rééducations régulières doivent être mises en place plusieurs fois par semaine, incluant de l’orthophonie, qui peut proposer des systèmes de communication autres que le langage, ainsi que de la psychomotricité, de la kinésithérapie et parfois de l’ergothérapie.
Des actions sur le comportement et le développement sont également essentielles. Elles s’appuient sur une approche dite « d’analyse appliquée du comportement » pour modifier des comportements inadaptés ou favoriser des comportements socialement souhaités. Enfin, la « guidance des parents » consiste à former les proches du patient afin qu’ils puissent eux-mêmes mettre en œuvre des approches d’éducation et de rééducation dans la vie quotidienne.
Plus un enfant est pris en charge tôt, meilleures sont les chances de minimiser ses troubles. Les interventions précoces et intensives, au moins 20 heures par semaine, sont fortement recommandées, notamment avant l’âge de 4 ans, car elles favorisent des progrès dans le langage, la socialisation, l’autonomie et les comportements adaptatifs.
La mise en œuvre d’un plan d’intervention personnalisé pour le spectre de l’autisme nécessite une équipe pluridisciplinaire : médecin, orthophoniste, psychologue, éducateur spécialisé, enseignant, référent…. Ce travail d’équipe s’étend à l’école, à la crèche, au médecin traitant, et peut être orchestré dans le cadre d’un parcours de soins organisé par une plateforme de coordination et d’orientation (PCO) pour optimiser les mesures prises.
L’accompagnement scolaire en milieu ordinaire est à privilégier lorsqu’il est possible pour les enfants atteints d’un trouble du spectre autistique. Ce dispositif propose des accompagnateurs d’élèves en situation de handicap (AESH), des adaptations pédagogiques et parfois, un emploi du temps aménagé. Des unités d’enseignement externalisées ou des structures médico-sociales peuvent également être conseillées selon les besoins spécifiques de l’enfant.
L’un des enjeux majeurs de la recherche médicale est de diagnostiquer le trouble du spectre de l’autisme le plus tôt possible, car plus la prise en charge multidisciplinaire est précoce, plus elle est efficace. Des travaux visent ainsi à mettre au point des outils de diagnostic précoce explorant par exemple la communication non verbale chez les tout-petits. L’imagerie cérébrale est aussi envisagée, car des défauts d’organisation et de mise en place de réseaux de neurones dédiés à la communication et à l’interaction sociale ont été mis en évidence chez les patients atteints de TSA.
D’autres équipes se concentrent quant à elles sur le métabolome, l’ensemble des petites molécules issues d’un échantillon biologique. Les particularités du métabolome des personnes souffrant de TSA pourraient servir de marqueurs pour le diagnostic ou le suivi de la maladie.
La compréhension des origines biologiques du trouble du spectre de l’autisme progresse grâce aux avancées de la recherche en génétique. À ce jour, plus de 200 gènes ont été associés à des formes d’autisme dans le cadre de projets internationaux portés sur les mécanismes pathologiques de la maladie. Les chercheurs s’intéressent aussi aux modifications épigénétiques, qui altèrent l’activité des gènes sans changer leur composition, et aux anomalies induites dans le nombre de copies de certains gènes, pouvant contribuer à la diversité et à la sévérité des manifestations du TSA.
Grâce aux progrès réalisés en imagerie cérébrale, les chercheurs peuvent analyser précisément les réseaux neuronaux engagés dans la communication sociale, le langage et la cognition émotionnelle. Alors que des réseaux sont sous-connectés, d’autres semblent hyperconnectés, traduisant une organisation atypique du cerveau propre à la TSA, qui reste à décrypter. En parallèle, des travaux de neurogénétique étudient les gènes impliqués dans la formation et le bon fonctionnement des synapses, les jonctions par lesquelles les neurones communiquent. Les perturbations au niveau des neurotransmetteurs tels que le glutamate, ou des hormones telles que la vasopressine sont également passées au crible.
Face à l’hétérogénéité des formes de trouble du spectre de l’autisme et à l’absence de traitement curatif, la recherche explore des approches innovantes ciblant les mécanismes biologiques sous-jacents de la maladie. Plusieurs essais cliniques ont porté sur des médicaments expérimentaux comme le bumétanide testé pour moduler l’activité neuronale anormale et l’ocytocine, en vue d’améliorer les capacités relationnelles. Plus concluante, l’utilisation d’ions bromures a montré des effets intéressants sur le comportement social et l’anxiété dans des modèles animaux de TSA.
D’autres stratégies thérapeutiques se construisent autour de l’hormone placentaire ALLO ou des dysfonctionnements du système immunitaire. Enfin, des traitements antibiotiques sont évalués pour agir sur les symptômes de la maladie en lien avec des dérèglements du microbiote intestinal.
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