Stress et anxiété : quel est l’impact de la nicotine sur les troubles psychiatriques ? Entretien avec Jacques Barik
Les troubles anxieux touchent des centaines de millions de personnes dans le monde et peuvent profondément altérer leur qualité de vie. Peur excessive, inquiétude persistante, attaque de panique… Ces troubles se manifestent sous différentes formes et nécessitent une prise en charge adaptée, avec de la psychothérapie et des traitements médicamenteux.
La recherche vise aujourd’hui à mieux comprendre les mécanismes de ces troubles dans le cerveau et à développer de nouvelles thérapies.
Quelques chiffres sur les troubles anxieux
Les troubles anxieux sont parmi les troubles psychiques les plus répandus dans le monde. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 301 millions de personnes en souffraient en 2019. En France, d’après l’Inserm, environ **21 % des adultes **connaitraient des troubles anxieux au cours de leur vie. Ces pathologies touchent 2 fois plus les femmes que les hommes et débutent souvent autour de l’adolescence. Malgré leur fréquence, les troubles anxieux restent sous-diagnostiqués, avec un impact significatif sur la vie quotidienne des patients.
Qu’est-ce que les troubles anxieux ?
Les troubles anxieux englobent plusieurs pathologies caractérisées par une anxiété ou une peur excessive et persistante face à certaines situations, sans pour autant que celles-ci ne représentent un réel danger. Contrairement à l’anxiété normale, qui est une réaction naturelle, les troubles anxieux génèrent une souffrance intense, avec un retentissement important dans la vie de tous les jours.
La classification des troubles anxieux est complexe. On en distingue 9 sous-types, dont les phobies spécifiques, l’agoraphobie, l’anxiété sociale, l’anxiété de séparation, le trouble anxieux généralisé et le trouble panique. Chacune de ces pathologies se manifeste par des symptômes différents, tant psychologiques que physiques.
Jusqu’en 2013, le manuel diagnostique et statistique des troubles psychiatriques (DSM) classait les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) et le syndrome de stress post-traumatique (TSPT) parmi les troubles anxieux. Ils en ont néanmoins été dissociés dans la dernière édition du manuel (DSM-5).
Quels sont les facteurs de risque des troubles anxieux ?
Les troubles anxieux résultent d’une interaction complexe entre plusieurs facteurs génétiques, environnementaux et psychologiques.
Les facteurs génétiques et neurotransmetteurs
Des prédispositions génétiques peuvent jouer un rôle clé dans l’apparition des troubles anxieux. Ainsi, certaines variations de gènes, tels que celui du récepteur à la sérotonine 5-HT1A, sont associés à un risque accru de présenter des troubles anxieux. Le risque est également plus élevé chez les personnes ayant un parent proche qui en souffre.
Par ailleurs, un déséquilibre des neurotransmetteurs, comme la sérotonine, le GABA et la dopamine, est largement suspecté dans ces pathologies, entraînant une mauvaise régulation des émotions et du stress. Les mécanismes précis de ces phénomènes restent cependant à élucider.
Les facteurs environnementaux et psychologiques
Des événements de vie stressants ou des traumatismes, tels que des agressions, du harcèlement, un deuil ou un accident, peuvent déclencher ou aggraver l’anxiété, surtout s’ils surviennent tôt dans la vie. Un environnement familial anxiogène, comme un manque de sécurité affective, peut également favoriser l’installation de l’anxiété dès l’enfance.
Les facteurs liés au mode de vie
La consommation de substances parmi lesquelles l’alcool ou les drogues, et la prise de certains médicaments pourrait favoriser l’apparition de troubles anxieux. Les pathologies chroniques et psychiatriques font aussi partie des facteurs de risque des troubles anxieux.
Quels sont les symptômes des troubles anxieux ?
Les troubles anxieux s’expriment par une grande variété de symptômes qui diffèrent selon les types de troubles. Certaines manifestations sont cependant communes. Dans tous les cas, l’anxiété devient pathologique dès lors qu’elle altère le fonctionnement du patient au quotidien et provoque une souffrance significative.
Les symptômes psychologiques des troubles anxieux
L’anxiété entraîne une peur excessive et incontrôlable, souvent associée à des ruminations et des pensées anxieuses envahissantes. En conséquence, les personnes concernées peuvent développer une irritabilité accrue, des troubles de la concentration, une baisse des performances intellectuelles, une perte d’intérêt et une difficulté à entreprendre des actions.
Les symptômes physiques des troubles anxieux
Les troubles anxieux sont susceptibles d’entraîner un grand nombre de symptômes physiques, parfois intenses. On observe fréquemment des palpitations et une accélération du rythme cardiaque, accompagnées d’une sensation d’oppression thoracique ou de souffle court. Des sueurs excessives, des tremblements, ainsi que des nausées, des vertiges et des troubles digestifs, ou des troubles du comportement alimentaire, sont également courants. Enfin, une fatigue chronique et des troubles du sommeil peuvent s’installer progressivement.
Une des réactions les plus remarquables, bien qu’elle ne concerne pas tous les patients, est l’attaque de panique. Il s’agit d’une crise d’angoisse aiguë au cours de laquelle se manifestent des symptômes physiques forts associés à une peur accrue.
Les troubles comportementaux
Les troubles anxieux influencent aussi le comportement. L’anticipation de la crise d’angoisse conduit souvent la personne à être dans un état d’hypervigilance, la poussant à éviter certaines situations, ce qui peut entraîner à un isolement progressif, ou à la mise en place de stratégies, comme des compulsions, pour calmer l’angoisse.
Comment les troubles anxieux sont-ils diagnostiqués ?
Le diagnostic des troubles anxieux repose sur une évaluation clinique réalisée par un professionnel de santé. Elle vise à mesurer la dimension pathologique de l’anxiété. Au cours d’une consultation avec un médecin ou un psychiatre, le patient est amené à décrire ses symptômes, leur fréquence, leur intensité et leur impact sur la vie quotidienne. Les antécédents médicaux, familiaux et psychologiques du patient, ainsi que la prise de médicament, d’alcool et de drogues, sont aussi évoqués.
Le diagnostic est établi selon les critères du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) et la classification internationale des maladies (CIM-11), qui permettent d’identifier précisément le type de trouble anxieux.
Des repères d’auto-évaluation, comme l’échelle de dépression (HAD), l’échelle d’anxiété de Hamilton (HARS) ou l’échelle de dépistage de l’anxiété généralisée (GAD-7) sont souvent utilisées pour mesurer la sévérité des symptômes. Il existe également des outils spécifiques aux enfants, dont les signes d’anxiété peuvent être différents ou plus difficiles à détecter que chez l’adulte. Le plus répandu est le questionnaire SCARED.
Quels sont les traitements contre les troubles anxieux ?
La prise en charge des troubles anxieux repose principalement sur la psychothérapie, éventuellement associée à des traitements médicamenteux et des adaptations du mode de vie en fonction de la sévérité des symptômes. L’objectif est de réduire ces derniers et de permettre au patient de retrouver un fonctionnement normal dans son quotidien.
Les psychothérapies
La psychothérapie, qui peut prendre différentes formes, est essentielle dans la prise en charge des troubles anxieux. Réalisée avec un professionnel de santé, psychologue ou psychiatre, elle joue un rôle important dans le traitement de ces pathologies.
Parmi les techniques existantes, la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) a déjà fait ses preuves. Elle a pour but d’apprendre au patient à gérer son anxiété, à restructurer ses pensées négatives et à limiter les comportements d’évitement en l’exposant progressivement et de façon sécurisée à des situations génératrices d’angoisse.
Les traitements médicamenteux
Des antidépresseurs à base d’inhibiteurs sélectifs de recapture de sérotonine (ISRS) peuvent être prescrits en traitement de fond pour l’anxiété chronique. Des anxiolytiques à action rapide, comme les benzodiazépines, peuvent aussi être utilisés lors des crises aiguës. Il faut cependant éviter de les prendre au long cours en raison du risque de dépendance et d’un certain nombre d’effets indésirables. Enfin, des bêta-bloquants, habituellement employés dans le traitement de l’hypertension artérielle, peuvent être recommandés pour limiter les symptômes physiques de l’anxiété, par exemple les palpitations et les tremblements.
L’amélioration de l’hygiène de vie
L’hygiène de vie est un élément clé de la prise en charge des troubles anxieux. Une activité physique régulière, une alimentation équilibrée, ou encore la mise en place de rythmes réguliers ont des effets bénéfiques sur l’anxiété. La diminution des substances telles que le café, le tabac ou l’alcool est également préconisée. Par ailleurs, des séances de relaxation ou de méditation peuvent être intégrées dans le quotidien des patients.
Quels sont les axes de recherche sur les troubles anxieux ?
La recherche sur les troubles anxieux s’articule principalement autour de deux axes visant à comprendre les mécanismes à l’origine de l’anxiété et à améliorer son traitement.
Comprendre les mécanismes de l’anxiété
La régulation des émotions, dont l’anxiété fait partie, est le fruit d’un ensemble de processus complexes dans le cerveau. Les mécanismes sous-jacents sont encore mal compris. Plusieurs régions cérébrales, comme le cortex insulaire ou l’amygdale, seraient impliquées. Les chercheurs tentent de comprendre comment ces régions communiquent entre elles, quelles sont les circuits sollicités et quel est le rôle des neurotransmetteurs dans la modulation de l’anxiété.
Améliorer le traitement des troubles anxieux
La recherche travaille également sur l’amélioration de la prise en charge des troubles anxieux. Dans ce cadre, l’exploration des techniques de neurostimulation, comme la stimulation magnétique transcrânienne (TMS), est à l’étude. De nouvelles formes de psychothérapies sont aussi développées, notamment les thérapies numériques, qui utilisent des outils digitaux pour aider les patients à gérer leur anxiété. En parallèle, les chercheurs tentent d’identifier de nouveaux biomarqueurs, par exemple avec le concours de l’intelligence artificielle, pour mieux diagnostiquer et traiter les différents types de troubles anxieux qui se manifestent chez les patients.
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Domaine d'action
Maladies neurologiques et psychiatriques
