Burn-out : quand on perd la flamme


Le burn-out, ou syndrome d’épuisement professionnel, est un trouble psychique lié à une exposition prolongée au stress au travail. Il associe fatigue émotionnelle intense, perte de motivation et diminution du sentiment d’accomplissement professionnel. Ce syndrome touche des salariés de tous les secteurs et peut avoir des répercussions graves sur la santé.
Mieux le comprendre permet d’agir au plus tôt, tant sur le plan individuel qu’organisationnel.
Le burn-out ou syndrome d’épuisement professionnel, semble courant en France comme le montrent les études épidémiologiques réalisées sur ce thème. Selon une analyse produite par Santé publique France, la souffrance psychique liée au travail concerne 5,9 % des femmes et 2,7 % des hommes en 2019, soit le double par rapport à 2007. Le burn-out touche 0,7 % des femmes et 0,34 % des hommes d’après la même étude.
Ces chiffres pourraient cependant avoir beaucoup progressé ces dernières années, en témoignent les sondages effectués après la crise sanitaire de Covid-19. Ainsi, d’après une étude menée en 2022 par OpinionWay pour le cabinet Empreinte Humaine, 34 % des salariés seraient en burn-out, dont 13 % en burn-out sévère, représentant environ 2,5 millions de personnes. Ce taux est à relativiser en fonction de la définition donnée au burn-out, mais suggère tout de même une augmentation majeure de la souffrance au travail depuis quelques années.
Outre l’impact humain, le stress au travail a également un coût pour la société. Dans une étude datant de 2007 et publiée en 2010, l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) l’a évalué entre 2 et 3 milliards d’euros par an en France, dont l’essentiel est lié à des pathologies psychiatriques.
Le burn-out correspond, selon la Haute autorité de santé (HAS), à un « épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel ».
Ce syndrome se caractérise généralement par 3 dimensions : un épuisement émotionnel, un désengagement vis-à-vis du travail, souvent traduit par du cynisme ou une perte d’intérêt, et une baisse du sentiment d’efficacité ou d’accomplissement professionnel, pouvant aller jusqu’à douter de ses propres compétences. Ces signes apparaissent de façon progressive, parfois sur plusieurs mois, et peuvent passer inaperçus dans un premier temps.
Le burn-out n’est pas reconnu comme une maladie au sens strict dans les classifications médicales internationales. Il peut néanmoins faire l’objet d’une reconnaissance en tant que maladie professionnelle, à condition d’être clairement établi comme résultant du travail. Le burn-out se distingue d’autres troubles comme la dépression, car il est exclusivement lié à une situation professionnelle. Il peut cependant coexister avec d’autres troubles psychiques, ce qui peut compliquer son diagnostic et nécessiter une prise en charge adaptée.
Aussi, le syndrome d’épuisement professionnel ne traduit pas un manque de résistance individuel, mais bien par une inadéquation entre les exigences et les ressources professionnelles disponibles. Il est la plupart du temps le reflet d’un déséquilibre organisationnel plus large, avec une surcharge de travail, un manque de soutien, une pression constante, une perte de sens et des conflits de valeurs. Encore mal connu, il est l’objet de nombreux préjugés contre lesquels il est impératif de lutter pour mieux prendre en charge les victimes.
Plusieurs facteurs de risque de burn-out ont été identifiés au sein de l’environnement professionnel. L’INRS cite la surcharge de travail, le manque de contrôle sur ses activités, les faibles récompenses, le manque d’équité entre les personnes, les conflits de valeur et les demandes contradictoires, ou encore le manque de clarté dans les objectifs et les moyens. La HAS ajoute à cette liste l’insécurité de l’emploi.
Le risque de développer un burn-out varie selon la catégorie de métier exercé. Des études réalisées chez les soignants ont par exemple montré que le burn-out peut concerner 50 % des médecins aux États-Unis et en France, avec des conséquences sur la qualité de prise en charge des patients. Plus globalement, les personnes exerçant une activité à forte charge émotionnelle ou nécessitant un investissement important seraient plus à risque.
Parmi les autres professions fréquemment touchées, on retrouve celles de l’enseignement, du travail social et les fonctions d’encadrement, où les contraintes relationnelles, les exigences de résultats et l’isolement favorisent le burn-out.
Le manque de soutien de la part de la hiérarchie ou des collègues constitue également un facteur aggravant. Lorsqu’il est combiné à d’autres éléments comme un déséquilibre entre les efforts fournis et la reconnaissance perçue, un sentiment d’injustice ou un contexte organisationnel instable, le risque d’épuisement est accru.
L’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) souligne que certaines caractéristiques personnelles peuvent accroître le risque de burn-out, sans réduire pour autant l’influence des facteurs de risque psycho-sociaux associés au travail. Parmi ces facteurs liés à l’individu, on retrouve un caractère consciencieux et une implication émotionnelle forte vis-à-vis du travail. Les antécédents personnels et familiaux, ainsi que des évènements de vie peuvent aussi jouer un rôle dans l’apparition d’un burn-out.
Il n’existe pas de tableau clinique unique, mais un ensemble de symptômes variables, tant dans leur intensité que dans leur expression. La HAS a établi un mémo sur le repérage et la prise en charge du burn-out. Ses manifestations sont à la fois physiques, psychologiques, cognitives et comportementales.
Parmi les signes physiques les plus fréquents du burn-out figurent une fatigue persistante non soulagée par le repos, des troubles du sommeil, des douleurs physiques diffuses comme des maux de dos, céphalées et troubles digestifs, ainsi qu’un affaiblissement général des défenses immunitaires.
Sur le plan émotionnel, on observe souvent une tristesse, une irritabilité inhabituelle, voire de l’anxiété. La personne peut aussi présenter une baisse de motivation marquée, une perte de plaisir à accomplir ses tâches habituelles, et une grande difficulté à se projeter dans un avenir professionnel. L’évolution du burn-out vers des formes plus graves peut s’accompagner de signes dépressifs, et même de pensées suicidaires.
Cognitivement, des troubles de la concentration, de la mémoire ou de la prise de décisions peuvent survenir. Ces signes altèrent directement l’efficacité au travail, ce qui alimente parfois un cercle vicieux de perte de confiance et de culpabilité.
Certains patients en burn-out adoptent des comportements d’isolement, se détachent de leur environnement social ou professionnel, ou développent une forme de cynisme vis-à-vis de leur activité. Des conduites d’évitement, un désengagement ou des tensions accrues avec les collègues ou la hiérarchie peuvent également apparaître.
Le diagnostic du burn-out repose avant tout sur un entretien clinique approfondi avec le médecin, qui évalue les symptômes en tenant compte du contexte professionnel et des facteurs de risque identifiés. Il n’existe pas de test biologique ou d’examen standardisé pour confirmer le diagnostic.
Le premier objectif du praticien est de différencier le burn-out d’autres troubles psychiques, tels que la dépression ou les troubles anxieux, en s’appuyant sur l’histoire du patient et sur l’impact des symptômes sur sa vie professionnelle et personnelle.
Des outils d’auto-évaluation, comme le Maslach Burnout Inventory (MBI) ou le Copenhagen Burnout Inventory (CBI), sont utilisés en complément pour repérer les différentes dimensions du syndrome, à savoir l’épuisement émotionnel, le désengagement et la perte d’efficacité. Ces questionnaires ne remplacent pas l’examen clinique, mais peuvent orienter l’analyse.
Il est important de détecter au plus tôt l’apparition d’un syndrome d’épuisement professionnel afin de maximiser l’efficacité de l’intervention. La prise en charge du burn-out passe en premier lieu par un arrêt de travail et du repos. Un accompagnement par un psychothérapeute est souvent nécessaire. En cas de signes de dépression associés, des antidépresseurs peuvent être prescrits.
La HAS souligne l’importance d’une approche pluridisciplinaire, impliquant le médecin traitant, le médecin du travail et si besoin, un professionnel de santé mentale. Le rôle de la médecine du travail est central pour évaluer les facteurs professionnels en cause et proposer des aménagements adaptés, comme une reprise progressive, un changement de poste, une redéfinition des missions ou un soutien managérial renforcé. L’entretien de pré-reprise avec le médecin du travail, obligatoire pour les arrêts de plus de 3 mois, permet d’anticiper les conditions de retour dans un cadre sécurisé et bienveillant.
Il est essentiel de ne pas limiter l’accompagnement à la seule dimension médicale : la prise en charge du burn-out doit impérativement intégrer une réflexion globale sur l’organisation du travail, le management et le collectif pour éviter les rechutes. Dans certains cas, une réorientation professionnelle, un bilan de compétences ou une formation peuvent être envisagés.
Les chercheurs essaient tout d’abord de mieux caractériser les mécanismes biologiques au cœur du burn-out. Ils se penchent ainsi sur le fonctionnement des circuits neuronaux affectés au cours du syndrome. L’objectif est de décrypter d’une part les altérations neurobiologiques, comme la dysrégulation de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien ou l’augmentation des marqueurs inflammatoires, et d’autre part les conséquences sur les fonctions cognitives, notamment la mémoire, l’attention et la concentration. Cela permettra à terme une meilleure prise en charge des patients.
Les facteurs de risque du burn-out peuvent être liés à l’organisation du travail (exigences élevées, manque de soutien, insécurité de l’emploi), à la personnalité (facteurs individuels), ou à l’environnement social du salarié. Le poids de ces facteurs est pour le moment mal défini. Des études sont menées afin de changer la donne. Elles permettront d’optimiser les outils existant en matière de repérage du burn-out, comme le Maslach burnout inventory (MBI), le Copenhagen burnout inventory (CBI) ou le Oldenburg burnout inventory (OLBI), et de mettre au point de nouveaux outils pour prédire et prévenir la survenue de ce syndrome selon différents contextes professionnels.
Des recherches s’attachent enfin à mieux différencier le burn-out des autres pathologies proches, comme la dépression, les troubles anxieux ou le syndrome de stress post-traumatique (SSPT), afin d’éviter les confusions diagnostiques et d’ajuster la prise en charge. Une autre perspective est de faire évoluer la reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle, ce qui n’est pas encore systématique, grâce à une évaluation plus fine de son coût social, et l’élaboration de politiques publiques dédiées.
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