Maladies mentales : des facteurs environnementaux importants à explorer

Quelques chiffres clés sur les pathologies mentales

Les pathologies mentales sont très fréquentes : on estime ainsi qu'un Français sur cinq souffre actuellement d'un tel trouble.

Une personne sur 5 fera une dépression une fois dans sa vie. Laschizophrénie touche 1 % des Français, les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) 2% et les troubles des conduites alimentaires (TCA) 10 % de la population. Les addictionsau tabac ou à l'alcool seraient responsables de plus de 100 000 décès par an en France. Autant de chiffres qui montrent l'importance de ces pathologies.

Selon l'Institut Montaigne, les coûts associés à ces maladies atteignent un total de 109 milliards d'euros par an en France. Près de 70 % des Français considèrent que les pathologies mentales ne sont pas des maladies « comme les autres ».

Maladies mentales : des pathologies comme les autres

Des maladies omniprésentes

Selon l'Organisation mondiale de la Santé, parmi les dix pathologies majeures du XXIe siècle se trouvent cinq troubles mentaux : la dépression, la schizophrénie, les troubles bipolaires, les addictions et le trouble obsessionnel-compulsif. Une preuve que les maladies mentales doivent être considérées avec une attention toute particulière.

Des classifications aujourd'hui bien établies

Depuis les années 1980, il existe des systèmes de classification reconnus internationalement, à l'instar de la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux de l'Association américaine de psychiatrie (DSM-V). Ils permettent de caractériser une pathologie mentale sur la base d'un ensemble de symptômes parfaitement identifiables. Le diagnostic, l'évaluation et la prise en charge des troubles mentaux répondent ainsi à des procédures cliniques précises.

On peut distinguer différentes catégories de pathologies, parmi lesquelles :

  • les troubles de l'humeur comme les dépressions ou les troubles bipolaires ;
  • les troubles anxieux comme le trouble panique, le trouble anxiété généralisée, le trouble anxiété sociale, les phobies, les troubles liés aux traumatismes et au stress, le trouble obsessionnel-compulsif ;
  • les troubles psychotiques comme la schizophrénie.

Quelques caractéristiques communes

Toutes ces maladies peuvent survenir à des âges différents, de façon aiguë ou progressive et emprunter une évolution récidivante, voire chronique. Elles ont pour caractéristiques communes le fait que les patients présentent des comportements anormaux et des rapports altérés avec autrui, une souffrance morale et des dimensions symptomatiques qu'elles peuvent partager entre elles, telles que la perte de la capacité à ressentir du plaisir ou d'autres émotions positives, une baisse de la motivation, un manque d'entrain et un ralentissement psychomoteur.

Une origine longtemps discutée

Pendant des décennies, médecins et chercheurs ont débattu sur l'origine génétique ou environnementale des maladies mentales. La multiplication d'études scientifiques permet aujourd'hui d'affirmer que, dans la très grande majorité des cas, les causes sont multiples, impliquant à la fois des facteurs biologiques, environnementaux, génétiques, psychologiques et sociaux.

C'est la rencontre entre une vulnérabilité individuelle, génétique, et des facteurs de risques environnementaux qui conduit au développement d'une maladie mentale.

De l'influence de l'environnement sur leur survenue

Aujourd'hui, de nombreuses recherches s'intéressent aux facteurs de risque de développer une maladie mentale, parmi lesquels l'environnement joue un rôle important : stress, événements de vie, alimentation, inactivité physique, exposition à des substances psychoactives, ces facteurs environnementaux sont nombreux et divers.

Certains facteurs sont modifiables

Parmi les facteurs environnementaux sur lesquels il est possible d'agir à l'échelle individuelle, on trouve principalement :

  • Le sommeil, dont la qualité peut ainsi affecter la santé mentale. Des études ont révélé qu'un sommeil insuffisant et/ou de mauvaise qualité peut affecter de multiples parties du cerveau, notamment le cortex préfrontal, en charge du raisonnement et de la prise de décision, et l'amygdale, impliquée dans la régulation de l'humeur et du stress.
  • L'activité physique, pratiquée de manière modérée et régulière, permet de réduire le stress et l'anxiété, notamment en favorisant la formation de nouveaux neurones dans l'hippocampe, une structure cérébrale impliquée dans la régulation des émotions. Conséquence : elle permet de diminuer le risque de dépression et de stress post-traumatique notamment.
  • L'alimentation, dont on sait qu'elle a un impact sur le fonctionnement de notre immunité et sur la survenue d'une inflammation chronique, peut, elle aussi, favoriser ou, au contraire, diminuer le risque de survenue de dépression.
  • L'exposition à des substances psychoactivestelles que l'alcool, le cannabis ou même le tabac, tout particulièrement lorsque les personnes présentent un usage chronique ou addictif, peut aussi augmenter la survenue de certaines maladies mentales.

Ces facteurs peuvent d'ailleurs être également impliqués dans de nombreuses autres pathologies comme les cancers ou les maladies cardiovasculaires.

D'autres sont plus difficiles à changer

Il existe d'autres facteurs environnementaux sur lesquels il est plus difficile d'agir. Il est quand même essentiel de mieux les comprendre.

Pour exemple, dès la vie in utero et durant la petite enfance, le stress peut créer des vulnérabilités. Le cortisol, l'hormone du stress libérée par la mère ou par le jeune enfant, va affecter le développement du cerveau, ce qui laisse des traces dans son fonctionnement. Des personnes exposées à des événements précoces stressants (défauts de soin, séparation des parents, abus sexuels) sont ainsi plus à risque de développer une dépression, une addiction ou un stress post-traumatique à l'âge adulte.

Des infections maternelles durant la grossesse pourraient également être impliquées dans l'émergence de certains troubles comme la schizophrénie.

Naître et vivre dans un environnement urbain a aussi été incriminé dans l'apparition de pathologies mentales.

Mais il ne faut pas oublier que le cerveau est très malléable, et qu'il peut aussi subir l'influence positive de facteurs de protection comme l'environnement social, l'activité physique ou le niveau éducatif.

Une recherche sur ces liens indispensable

Des recherches complexes et récentes

Ainsi, les liens entre maladies mentales et environnement sont complexes. Facteurs de risque et facteurs de protection se mêlent à une susceptibilité d'origine génétique, avec parfois un temps très long entre l'exposition à ces facteurs et la survenue d'une pathologie. Cela en complique l'étude, et explique probablement pourquoi la psychiatrie a longtemps été le parent pauvre de la recherche médicale. Pour l'illustrer, en 2011, un rapport de la Cour des comptes dénonçait une « sous-dotation persistante de la recherche psychiatrique » dans notre pays. L'année suivante, une étude française révélait en effet que la France ne consacre que 2 % de son budget de recherche biomédicale à la psychiatrie (21 millions d'euros), contre 7 % en Grande-Bretagne (131 millions d'euros).

Ainsi, ce n'est que depuis une quinzaine d'années que les travaux se sont multipliés pour étudier les maladies mentales.

Mieux prévenir et progresser dans le dépistage de ces maladies

Plus que jamais, la recherche en psychiatrie et plus précisément sur les facteurs environnementaux qui régissent l'apparition de pathologies mentales est indispensable.

Il s'agit d'identifier des facteurs environnementaux encore inconnus, par exemple par le biais études épidémiologiques de suivi au long cours, de l'enfance à l'âge adulte.

Mieux comprendre leurs mécanismes d'action par des approches de biologie moléculaire et cellulaire est également nécessaire. Une des pistes de recherche réside notamment dans l'épigénétique, des modifications qui ont lieu non pas au niveau de la structure même de l'ADN, mais sur des motifs chimiques présents sur l'ADN, ce qui induit des changements dans la façon dont les gènes s'expriment. Des facteurs environnementaux pourraient ainsi moduler l'expression de gènes, ce qui influencerait par la suite le développement d'une pathologie mentale.

Identifier ces facteurs ou comprendre leur action permettra la mise en place de mesures de prévention collectives ou individuelles et de dépistage précoce des troubles mentaux afin d'en réduire le nombre et le retentissement dans la population, mais aussi de développer des traitements plus personnalisés.

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