Maladie du soda : L’évolution pathologique d’un foie trop gras

07 janvier 2020

Chantal DesdouetsChantal Desdouets

Au Centre de recherche des Cordeliers, à Paris, l'équipe de Chantal Desdouets cherche à décrypter les mécanismes qui conduisent
à la maladie du soda.

Son objectif est de contrer l'apparition de cette pathologie métabolique sévère du foie, inquiétante par son expansion mondiale.

Avec son équipe Inserm « Prolifération, stress et physiopathologie hépatique », Chantal Desdouets s'est installée depuis janvier 2019 au Centre de recherche des Cordeliers, à Paris, pour mener ses travaux sur la maladie du soda.

La maladie du soda, qui toucherait près de 8 millions de Français, est la dernière maladie hépatique émergente. Appelée scientifiquement stéatohépatite non alcoolique, ou NASH (son acronyme anglais), elle est la conséquence d'une alimentation trop riche en sucres et en graisses saturées conjuguée à un comportement sédentaire.

L'augmentation de sa fréquence, liée à l'épidémie d'obésité et de diabète, alerte les médecins.

Et pour cause : cette pathologie chronique du foie évolue silencieusement pendant des années, ce qui ne fait que renforcer sa gravité.

« Le foie est un organe particulièrement sensible à l'accumulation de graisse, explique Chantal Desdouets, spécialiste en biologie cellulaire et moléculaire et directrice de recherche au Centre de recherche des Cordeliers. Chez les patients en surpoids ou diabétiques, les cellules du foie commencent par se gorger de gras. »

Ce stade sans symptôme, nommé stéatose hépatique, est encore réversible en adoptant une meilleure hygiène de vie. Mais sans cela, la maladie évolue et une inflammation du foie se produit.

Progressivement, l'organe grossit, devient fibreux et ne fonctionne plus correctement : c'est la NASH, irréversible.

L'altération du métabolisme peut alors nécessiter une transplantation hépatique, seul traitement actuellement disponible. Sans compter que son stade ultime, la cirrhose, peut conduire à un cancer du foie.

Chantal Desdouets poursuit :

« Grâce à des modèles de souris qui reproduisent les différentes étapes de la maladie, nous avons découvert qu'au stade de la stéatose hépatique, le gras en excès dans les cellules hépatiques induit des cycles de division cellulaire plus courts, au cours desquels se produisent des cassures de l'ADN. Les systèmes de réparation et de contrôle, naturellement présents dans toute cellule, finissent par être débordés. L'accumulation des lésions aboutit alors à activer le système inflammatoire, ce qui aggrave encore la maladie.»

L'équipe tente maintenant de percer les mécanismes en jeu chez l'Homme.

À cet effet, elle s'appuie sur une collaboration avec la Pr Valérie Paradis, anatomopathologiste à l'hôpital Beaujon, qui a constitué une cohorte de patients souffrant de NASH.

« Nous vérifions que les mécanismes identifiés dans nos modèles murins sont aussi présents chez les patients, justifie Chantal Desdouets. De plus, nous investiguons la question du devenir des cellules hépatiques à chaque stade de la maladie. Et notamment le fait qu'elles puissent induire le développement tumoral. Notre premier objectif est de trouver une stratégie pour enrayer le déclenchement de l'inflammation et maintenir la maladie au stade bénin. »

Actualité issue du magazine trimestriel de la FRM Recherche & Santé 161